Remus - Nothing but a shadow of a man [Fiche terminée]

→ Ce que je pense de Pompéi
Comment pourrais-je avoir un avis véritablement tranché sur la question puisque de Pompéi je ne connais que le Ludus de mon maître, l'amphithéâre où les combats ont lieu, et quelques rues commerçantes où notre Dominus nous emmène de temps à autres. Je sais que la ville est grande mais j'ignore à quoi elle ressemble puisque je n'ai donc vu cette cité qu'à travers mes yeux d'esclave et non pas en tant qu'homme libre. Pour ce qui est de ses habitants, ils sont comme les habitants des autres cités sans doute : du riche au pauvre, du politicien à l'esclave en passant par le commerçant. Des gens parmi tant d'autres. Quant à ceux qui se délectent des jeux sanglants que nous, gladiateurs, leur proposons, loin de moi l'idée de les juger : sans leur engouement, nous ne pourrions pas continuer à faire ce que nous faisons, nous ne pourrions pas gagner cet argent si précieux qui pourrait nous être fort utile en tant voulu.

→ Ce que je pense de la politique
Là encore, de ce que j'ai pu apercevoir, il me semble que ces politiciens sont comme partout ailleurs : certains sont honnêtes mais beaucoup sont sans doute corrompus jusqu'à l'os, prêts à trahir l'autre à la moindre occasion. C'est encore pire en ce moment, même nous, esclaves, nous ressentons bien la différence. Et finalement, tout ceci risque de bien changer encore puisque nous sommes à l'aube d'une nouvelle ère, à l'aube d'un empire puisque notre république a désormais pris fin.

→ Ce que je pense des jeux
Ayant à la base vécu bien loin de tout ceci, je n'avais pas vraiment d'avis sur la question. Maintenant que je suis au cœur de ces jeux, au cœur de ces combats, je me trouve partagé entre deux opinions. Sans ces combats, je serais déjà mort et je n'aurais jamais eu l'occasion de me battre pour essayer de retrouver ma fille. Et puis, finalement, les seuls moments où je me sens libéré de tout sont ces moments où tout devient blanc lors d'un combat, quand je me perds pour ne plus penser. En même temps, c'est tellement différent de la guerre... Ces jeux sont là pour amuser la galerie, nos blessures, la mort de nos frères animent la foule et les rendent euphoriques et je dois bien avouer que j'ai du mal à comprendre cette passion pour le sang et la violence. Cela ne m'empêche pas de me donner corps et âme dans chaque combat jusqu'au jour où peut-être, les choses changeront.

→ Mes souhaits, mes rêves, mes ambitions
Pour être tout à fait franc, je n'ai plus aucun rêve ni aucune ambition. Mon seul et unique souhait est de retrouver ma fille et de l'enlever à cette vie de servitude qu'elle doit subir par ma faute. Je survis pour ça et rien que pour ça. Alors, même si je suis prêt à accueillir la mort, au fond, j'espère qu'elle attendra que ma fille soit en sécurité. Après ça, les Dieux pourront faire ce qu'ils veulent de moi.

→ Ma pire crainte
Ma pire crainte est de ne jamais retrouver ma fille, ou de la retrouver morte, ou encore horriblement blessée tant physiquement que mentalement. Je sais ce dont certains maîtres sont capables et je ne peux que prier pour que les Dieux soient assez cléments pour lui épargner des blessures dont elle porterait les cicatrices jusqu'à la fin de ses jours.

→ Heureusement, les Dieux veillent sur moi.
La religion a toujours eu une place importante dans mon existence. Mon père était un homme très pieux et c'est dans cet esprit qu'il m'a éduqué. Très vite, j'ai appris qu'il fallait respecter et honorer les Dieux. J'ai bien sûr vénéré Jupiter, Dieu de tous les Dieux et ensuite, en grandissant, j'ai appris à honorer les Lares, Pénates et les Mânes. Quand j'ai finalement rejoint l'armée, j'ai souvent prié pour la protection de Mars et j'ai souvent supplié les Parques de ne pas m'éloigner de cette vie trop tôt car je ne voulais quitter ni ma femme, ni ma fille. Ma femme vénérait énormément Vesta pour qu'elle nous apporte la protection au sein de notre foyer. Quand ma femme est morte et quand j'ai tué mon frère avant de devenir esclave, tout a changé. Si je continue à vénérer Jupiter, aujourd'hui,  c'est auprès des Parques que je prie le plus souvent pour qu'elles ne me prennent pas ma fille. Il m'arrive aussi très souvent d'en appeler à Vesta pour qu'elle veille sur ma fille qui est tout ce qu'il me reste de ce foyer que je chérissais tant. J'en appelle aussi à Minerve pour qu'elle me donne la sagesse dont j'ai besoin pour combattre de la meilleure façon possible afin de gagner. Quant à ce nom que mon Dominus m'a donné, il a préféré Remus à Romulus pour ses propres raisons, et c'est finalement le nom qui me convient le mieux puisque même si j'ai tué mon frère, l'homme que j'ai pu être avant a lui-même été tué par son propre frère quand il a appris l'infâme et cruelle trahison de ce dernier. Je porte donc très bien le nom de Remus, ce frère assassiné par son propre frère. Oui, je le porte bien.

What is done can not be undone.

« Flavia, tu dois me promettre que tu vas rester enfermée dans ta chambre. C'est très important. »

Ma main couverte de sang était posée sur la petite joue de mon enfant qui n'était alors âgée que de six ans et cette main tremblait. Elle tremblait tellement... Flavia me regardait avec les yeux écarquillés, ne saisissant pas bien mon ordre : je ne lui avais jamais ordonné une telle chose.

« Pourquoi ? Pourquoi tu es tout plein de sang ? »

Ne pouvant me résoudre à lui répondre, je la serrai dans mes bras et quand je sentis ses petites mains fragiles se poser sur ma nuque, je ne pus empêcher les larmes de couler même si je fis un effort pour pleurer silencieusement. Elle n'était cependant pas bête, au contraire. Elle avait malheureusement grandi trop vite.

« Pourquoi tu pleures ? C'est à cause de ce Marcus nous fait à maman et moi ? »

Je me raidis avant de me reculer et de plonger un regard horrifié dans celui de ma fille, un regard qui me sembla horriblement éteint. Elle avait beau être jeune, elle avait vécu des choses qu'elle n'aurait jamais dû vivre et elle avait bien compris que tout ce qu'elle avait vécu n'était pas normal. Et, bien sûr, elle avait entendu la violente dispute la veille entre sa mère et moi, cette dispute qui avait fait éclater cette abominable vérité qui me rongeait à présent de l'intérieur.

« Oui... » répondis-je d'une voix tremblante. « Oui, c'est pour ça. »

Et là, contre toute attente, un sourire se dessina sur ses lèvres avant qu'elle ne vienne se blottir dans mes bras.

« Il faut pas. Maintenant que tu es rentré, Marcus il va s'en aller, non ? Maman ne pleurera plus jamais à cause de lui, et moi non plus. »

Mes bras se refermèrent autour de mon enfant et je levai les yeux au ciel, demandant aux Dieux d'être cléments et de m'aider à faire face à toute cette souffrance. Non, sa mère ne pleurerait plus parce qu'elle n'était plus. Cependant, j'allais faire en sorte que ma fille non plus ne verse plus jamais une larme à cause de son oncle. Je finis par me reculer et par prendre le visage de ma fille entre mes mains. Je me penchai et déposai un baiser sur son front avant de me saisir d'un linge traînant sur le bord du lit et d'essuyer ses joues que j'avais recouvertes de sang malgré moi. Elle se laissa faire en m'observant avec attention.

« Tu restes ici. Tu me le  promets ? »

Elle hocha la tête.

« Oui, je le te promets. »

Son sourire me réchauffa le cœur même si je savais que le soir venu, elle ne sourirait plus jamais de la même manière en apprenant la mort de sa mère. Je déposai un dernier baiser sur son front avant de quitter la chambre et de refermer la porte derrière moi avec précaution. Une fois dans le couloir, je me rendis compte que durant quelques instants, Flavia avait calmé ma douleur, ma colère et ma rage mais, maintenant que je l'avais quittée, tout me revenait de plein fouet avec une violence incroyable. J'en serrai les dents et les poings tant j'étais furieux et fou de douleur. Marcus allait payer. Par tous les Dieux, il allait payer. Je quittai la maison non sans avoir un regard pour le corps de ma femme que j'avais enveloppé dans un drap et déposé sur le sol de ce qui était la plus grand pièce de notre humble maison. Marcus n'habitait qu'à une une petite centaine de mètres de nous puisque nous partagions la ferme familiale et il ne me fallut donc pas très longtemps pour rejoindre la demeure de mon petit frère.

« MARCUS ! » hurlai-je une fois arrivé devant chez lui.

Il mit un petit moment pour sortir, étant sans doute accompagné encore une fois par l'une de ces femmes qu'il ramenait chez lui et qu'il renvoyait chez elles une fois lassé. Quand il arriva, s'il affichait un air détendu et jovial au départ, son visage s'assombrit rapidement en me voyant plein de sang et en voyant ma main portée sur le manche de mon épée. Il ne sembla pas effrayé mais juste curieux de ce qui avait pu se passer.

« C'est quoi tout ce sang ? Quelqu'un est blessé ? »

Le ton dégagé avec lequel il avait demandé ça ne fit qu'accroître ma rage.

« Ce sang, c'est le sang de Livia. Elle s'est tuée... »

Il écarquilla les yeux avant de faire un pas en avant vers moi. Son expression compatissante aurait pu paraître véritable si je n'avais pas su les raisons qui avaient poussé ma femme à mettre fin à ses jours. Si j'étais en partie responsable pour avoir douté d'elle, lui était responsable pour l'avoir...

« Je suis désolé de l'apprendre. »

« Dis-moi que tu n'as pas fait ça. Marcus... Dis-moi que tu n'as pas fait ça. »

Peut-être qu'au fond, j'espérais qu'il se défende et qu'il trouve une explication logique et censée à tout ceci. Cependant, une ombre voilà son regard et un sourire que je ne lui connaissais pas se dessina sur ses lèvres.  Sans même que je ne m'explique, il avait compris de quoi je parlais et pour cause : c'était tout simplement la vérité. A ce moment-là, j'eus l'impression de ne plus le connaître ou plutôt, de ne l'avoir jamais réellement connu.

« Je ne te mentirai pas : j'ignore ce qu'elle a pu te dire exactement mais tout est vrai. Absolument tout, et je ne regrette rien. »

Mes yeux se brouillèrent de larmes.

« Pourquoi ?... »

« Tu me demandes pourquoi ? Je suis resté ici à aider papa et après sa mort, c'est moi qui me suis occupé de la ferme pendant que toi tu parcourais le pays et tu sais ce que j'entendais ? "Lucius." J'ai continué à m'occuper de la ferme, à aider ta femme, à élever ta fille quand tu n'étais pas là, je faisais tout comme il fallait et tu sais ce que j'entendais encore ? "Lucius." J'ai finalement voulu me rapprocher de ta femme mais elle a refusé, alors, j'ai fait ce que j'avais à faire. Elle ne voulait pas voir l'évidence et l'évidence c'était qu'elle avait besoin d'un homme et le seul homme qui pouvait s'occuper d'elle, c'était moi. »

Mes doigts se refermèrent avec plus de fermeté autour du manche de mon épée.

« Ma femme... Et ma fille... Ta nièce Marcus... »

« Que veux-tu que je te dise ? Un jour elle nous a surpris et elle semblait tellement curieuse... »

« Je te tuerai pour ça. »

« Oh mais je te défie d'essayer mon cher frère » dit-il en sortant son épée. « Je gagnerai. Je te tuerai et ensuite, j'irai chercher ta fille. Elle est à moi. »

Ce fut le mot de trop. Je me jetai sur le lui et tout alla très vite. J'étais dans un tel état de rage qu'il n'eut finalement pas le temps de répliquer si bien qu'à la fin, son corps n'était plus qu'un piètre amas de chair ensanglantée alors que moi, je n'avais aucune blessure. Un combat ? Non. Une exécution, ni plus, ni moins. Ce fut là ce qui entraîna ma chute et celle de ma fille. Je restai un moment à observer le cadavre de mon frère avant de rentrer chez moi. Il me fut horriblement difficile d'expliquer à Flavia ce qu'il s'était passé mais je préférai de rien lui cacher. Aussi, je lui annonçai la mort de sa mère avant de lui dire que j'avais moi-même tué son oncle. Ce n'est pas cette dernière nouvelle qui choqua Flavia mais bien la disparition de sa mère. Elle resta un moment à côté de son corps à pleurer avant que je ne finisse par la convaincre que nous devions l'enterrer. Une fois cela fait, j'expliquai à ma fille que nous devions partir mais elle était tellement meurtrie par la mort de sa mère qu'elle ne s'opposa pas à ce départ. J'entrepris donc de préparer nos affaires et j'étais sur le point d'avoir terminé quand j'entendis la porte d'entrée s'ouvrir avec fracas. Je me mis aussitôt devant Flavia, sur la défensive, ne comprenant pas qui pouvait rentrer chez nous de cette façon. J'eus rapidement la réponse quand des soldats déboulèrent dans la chambre avant de se jeter sur moi. Je résistai autant que possible mais mes gestes furent moindres en raison de la présence de ma fille : la pièce était étroite et j'avais trop peur de la blesser. Une erreur qui me fut fatale puisque les soldats me maîtrisèrent. La dernière chose que je vis avant de sombrer dans le néant fut le visage horrifié de Flavia, les joues noyées de larmes.

Son hurlement résonne encore dans ma tête.

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Fight, bleed but never, ever forget the past

« Tu entends ces cris ? C'est ton sang que la foule demande. Ne fais pas cette tête... Tu aurais pu être crucifié mais à la place, ils te permettent de mourir en beauté face à des gladiateurs : tu devrais être reconnaissant. »

Je ne connaissais pas l'homme que j'avais face à moi mais il semblait ravi à l'idée de me voir affronter des hommes au milieu d'une arène. J'étais finalement arrivé à Pompéi où de grands jeux avaient lieu et où j'allais être exécuté pour le meurtre de mon frère. Quand je m'étais réveillé pour la première fois enchaîné, j'étais dans un chariot. Quand j'eus la possibilité de parler à quelqu'un et de poser les questions qui me brûlaient les lèvres, on m'annonça brièvement que j'étais en route pour Pompéi pour y être exécuté durant des jeux et, pour ce qui était de ma fille, on m'expliqua qu'elle avait été emmenée pour être vendue. Elle était condamnée à la servitude. Une nouvelle qui acheva de me détruire. Dans cette cellule où j'attendais que l'on vienne me chercher, je repensais à ce qu'avait été ma vie et comment j'avais pu en arriver là. Avais-je été trop égoïste ? Oui sans doute puisque j'avais choisi cette vie de militaire plutôt qu'une vie de famille. Pourtant, à chaque fois que je quittais ma femme et ma fille, j'avais mal, très mal de les quitter mais mon devoir envers notre république passait bien avant tout : une grave erreur car mon devoir aurait dû être envers ma famille en priorité.

Je le comprenais à présent.

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Très jeune, j'avais voulu devenir militaire, j'avais voulu servir la république et cela avait fait la fierté de mon père, ma mère ne pouvant se réjouir de la nouvelle pour avoir perdu la vie après avoir donné naissance à mon petit frère. La rencontre avec Livia alors que je n'étais âgé que de 16 ans n'avait pas changé ce désir de rejoindre les rangs de l'armée. L'amour brûla vite entre nous si bien qu'à l'aube de mes 17 ans, alors que je m'apprêtais à rejoindre les légions, nous nous mariâmes. Puis, je rejoignis les légions pour devenir un Antesignani, une place que ma jeune femme détestait puisqu'elle estimait que j'étais de ceux qui prenaient le plus de risques mais ce poste me convenait parfaitement : j'étais fier de participer à l'extension de notre république, j'étais fier de porter les couleurs de notre nation et nous rendre plus fort un peu plus chaque jour. De plus, j'étais particulièrement heureux de pouvoir autant voyager. Nos séparations étaient longues et nos retrouvailles bien courtes mais j'étais rassuré de savoir que mon père et mon frère étaient là pour elle et bientôt, pour elles, puisque durant une longue absence, j'eus un billet m'annonçant la grossesse de ma femme. Lorsque je rentrai, je retrouvai ma femme et ma fille qui était déjà âgée de quatre mois. Les quitter fut encore plus difficile. De plus, mon père étant maintenant décédé, c'était mon petit frère âgé de deux ans de moins que moi qui allait devoir s'occuper de tout et cela ne me rassurait pas. Je ne pouvais cependant pas déserter et quitter la légion : quel honneur y aurait-il eu dans un tel acte ? Alors, je continuais à partir et à revenir, laissant mon jeune frère s'occuper de notre ferme familiale et veiller sur les deux femmes de ma vie. Au fil des ans, le comportement de ma femme se modifia à chacun de mes retours mais je ne jugeai pas utile de lui poser des questions, étant persuadé que son comportement était dû à mes longues absences.

J'aurais dû lui poser des questions.

Un jour, alors que j'étais rentré, je reçus un étrange billet anonyme m'annonçant que ma femme bien aimée me trompait avec mon propre frère. J'eus vite fait de détruire cette infâme mot qui respirait le mensonge : ma femme m'aimait trop pour me faire une chose pareille et mon frère, lui, me respectait trop pour me trahir de la sorte. Je mis donc cette information dans un coin de ma mémoire jusqu'à ce que j'aperçoive un geste déplacé de la part de mon frère. J'attendis qu'il soit parti et j'explosai, accusant ma femme de trahison, lui jetant des horreurs à la figure et finalement, la vérité tomba : elle ne m'avait jamais trompé mais lui, mon frère, avait abusé d'elle et de notre fille durant toutes ces années où j'avais été absent. Il y eut un moment où j'eus du mal à le croire mais en voyant l'expression de ma femme, je compris qu'elle disait vrai. L'horreur s'empara de mon esprit et de mon cœur et quand j'eus finalement un geste vers elle, elle me repoussa. Je ne dormis pas cette nuit-là. Ma femme se leva aux aurores et je fus surpris de la voir se pencher pour déposer un tendre baiser sur mes lèvres, elle qui avait refusé que je l'approche la veille au soir. Je restai malheureusement figé, incapable du moindre geste cette fois-ci, encore trop choqué. Je me levai peu de temps après elle et fut surpris de ne pas la voir à l'intérieur de la maison. Je sortis et c'est là que tout bascula. Elle était là, allongée près de l'unique chariot que nous possédions et baignait dans une mare de sang. Mon cœur s'arrêta. Je fonçai jusqu'à elle et m'agenouillai à ses côtés avant de la prendre dans mes bras. Elle était pleine de sang et je pouvais voir très nettement un large trou très profond juste à la base de sa gorge. Pendant un instant, je crus qu'on l'avait tuée mais quand mon regard quitta sa gorge pour glisser doucement jusqu'à sa main, je vis qu'elle tenait un couteau. Je la sentis se mouvoir légèrement contre moi et reportai mon regard à présent rempli de larmes vers son visage. Je glissai ma main sur sa blessure mais me rendis rapidement compte que je ne pouvais pas arrêter l'hémorragie : il ne lui restait que quelques instants à vivre. Elle plongea son regard dans le mien et le soulagement que je vis dans ses yeux me brisa le cœur : elle voulait partir. Elle esquissa même un sourire avant que ses yeux ne se voilent et se ferment. Je la serrai alors contre moi comme jamais.

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« Hey, on se réveille ! »

J'ouvris les yeux et me rendis compte que je m'étais assoupi. Le même type se trouvait toujours devant moi : alors il était temps. J'avais l'impression de n'être qu'une coquille vide et quand j'arrivai au milieu de l'arène, je ne prêtai même pas attention aux huées des spectateurs. Je vis simplement les cinq gladiateurs qui se tenaient en cercle, prêts à m'accueillir et surtout à m'envoyer en enfer. Parfait, c'était tout ce que je demandais. On m'envoya une épée que je ramassai même si je n'avais pas l'intention de m'en servir. Quand même bien j'en aurais eu l'intention, la lame était tellement dans un état pitoyable que je n'aurais pas pu en faire grand chose. Les coups tombèrent rapidement mais je n'eus même pas l'impression de les sentir tant je n'étais plus qu'un corps qui attendait sa fin. Les quelques coups d'épées ne furent pas plus douloureux que les autres coups et pourtant, chacun leur tour, ils s'en donnèrent à cœur joie. J'étais une poupée de chiffon sur laquelle ils passaient leurs nerfs. A un moment donné, j'étais au sol, je pouvais sentir le goût du sang dans ma bouche et ma vue elle-même était brouillée par le sang qui s'écoulait de mon front. J'eus un regard pour la foule qui, comme moi, n'attendait qu'une seule chose : ma mort. C'est là que je la vis, au milieu de tout ces gens : Flavia. Ce n'était pas vraiment elle, juste un souvenir d'elle, une image floue mais pourtant, je la voyais très bien tout comme j'entendis très bien sa voix « Papa... N'abandonnes pas... ». Le coup d'épée siffla à mes oreilles mais je l'avais évité. Voir Flavia, l'entendre m'avait ramené à la réalité : Livia était morte et je l'étais presque mais Flavia, elle, était encore en vie. Elle avait été achetée et demeurait quelque part et je devais vivre pour elle, pour la retrouver.

En tout cas, pour commencer, je devais survivre à cette exécution.

Ce fut dans le regard et dans la voix de ma fille que je trouvai le courage et la force d'affronter mes ennemis. Je tuai le premier en retournant son arme contre lui, lui tranchant la gorge d'un coup net. Le second fut tué grâce à l'épée de son frère et ce fut ses viscères qui touchèrent le sable de l'arène en premier. Quant aux trois autres, leur mort fut rapide bien que douloureuse : en un instant, tout était devenu blanc comme quand j'avais tué Marcus. Mon instinct de militaire m'avait aidé mais c'était surtout l'instinct de tuer qui avait pris le dessus. Quand les gladiateurs furent au sol, il y eut un moment de flottement pendant lequel il n'y eut plus aucun bruit. Puis, la foule s'enflamma non pas contre moi mais pour moi. Apparemment, le retournement de situation leur avait plu. Je fus finalement ramené à ma cellule. J'ignorais ce qui allait se passer mais j'étais sûr d'une chose : ils pouvaient m'envoyer autant d'hommes qu'ils le souhaitaient et je les tuerais tous, sans hésitation, si cela pouvait me ramener ma fille.

Finalement, j'eus la visite d'un homme qui changea tout. La visite d'un homme qui allait devenir mon maître, mon Dominus : Sextus.

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My name is Gladiator

J'abandonnai mon nom romain et devint Remus. Mes débuts au sein du Ludus furent difficiles car j'étais détesté de la plupart des gladiateurs : ils avaient tous eu vent de mon fratricide et puisqu'ils en ignoraient la raison, ils ne pouvaient ni m'apprécier, ni me faire confiance. Je n'étais cependant pas là pour me faire des amis : j'étais là pour apprendre à être un gladiateur, pour passer le test, pour gagner la marque de Sextus et pour terrasser des hommes dans l'arène afin de pouvoir un jour, je l'espérais, gagner ma liberté. Je passai le test, je devins gladiateur et, contre attente, trouvai un ami, un frère au sein du Ludus : Vitorius.

Cinq années ont passé et je n'ai cessé de combattre pour satisfaire mon maître et aussi, pour gagner l'argent dont j'ai besoin pour espérer un jour acheter ma liberté afin de retrouver ma fille pour laquelle je prie chaque jour. Malheureusement, mes démons me hantent et je ne suis finalement plus que l'ombre de moi-même, prêt à accueillir la mort si elle souhaite m'emmener avec elle. Je suis un fantôme qui erre, qui attend, patiemment. Si je dois partir, je sais que Vitorius, mon frère, fera en sorte que ma fille soit retrouvée, si elle est toujours en vie. Alors non, je ne crains pas la mort mais je crains qu'il ne soit trop tard pour ma fille. Quant à ma vie au sein du Ludus, elle est plus calme qu'à mes débuts même s'il persiste toujours une certaine méfiance de la part de certains et pour cause : je n'ai jamais raconté mon histoire à personne en dehors de Vitorius. Lui seul connaît mon véritable nom, lui seul sait que j'ai été un légionnaire, lui seul est au courant de ce qu'il s'est réellement passé. Pourquoi garder tout ceci secret ? Vous croyez vraiment que mes frères apprécieraient de savoir que j'ai autrefois fait partie de la légion ? J'en doute fort personnellement.

LIENS

Flavia / Fille
Elle est tout ce qu'il me reste en ce monde. On me l'a arrachée quand j'ai été arrêté et j'ai su qu'elle avait été vendue pour devenir esclave. Aujourd'hui, j'ignore où elle est, j'ignore si elle est toujours en vie mais je prie pour que ce soit le cas et je prie pour la retrouver. Je ne vis que pour ça.

Sextus / Dominus
Sextus est un homme que je respecte profondément. Après tout, en faisant de moi ce que je suis aujourd'hui, il m'a sauvé et m'a permis de conserver l'espoir de retrouver un jour ma fille. Cependant, il n'est pas au courant de mes projets concernant ma liberté et mon départ quand cela me sera possible. En tout cas, pas pour le moment. Depuis peu, je commence à réfléchir à l'éventualité de lui en parler et de lui demander son aide.

Vitorius / Meilleur ami et frère
Il est devenu mon meilleur ami, mon frère, celui sur qui je peux compter en n'importe quelle circonstance. Il m'a rapidement apporté son soutien quand les autres m'ont rejeté et malgré mes réticences, il n'a jamais abandonné. Son amitié est telle qu'il a proposé de m'aider en me donnant ses gains pour que je puisse gagner ma liberté plus tôt.

Antiope / Sœur
Oui, je considère Antiope comme ma sœur et pourquoi en serait-il autrement ? Nous autres, gladiateurs, quand nous portons la marque de notre Dominus, nous nous disons frères et puisqu'elle porte cette même marque, elle est donc ma sœur. Contrairement à d'autres, le fait qu'elle soit une femme qui se bat dans l'arène ne me choque pas mais m'inspire un profond respect. Je souhaite vraiment qu'elle parvienne un jour à acheter sa liberté pour pouvoir retrouver les siens.