Lucius Pompeius Publicola - Nam et ipsa scienta potestas est

→ Ce que je pense de Pompéi
Pompéi, cette ville qui m'a vu naître et que mon grand-oncle nomma d'après lui. Chaque pierre qui la constitue est pour moi mon héritage, comme les habitants qui la peuplent. Et je ne prends pas à la légère ce qui m'échoit : le destin de cette ville ne peut aller que de paire avec le mien. D'aucuns m'accuseront d'Ubris car la ville appartient avant tout à ses citoyens mais je n'en ai cure. Du sable de l'arène au marbre des colonnades : tout ceci me revient et j'entends bien le garder.

→ Ce que je pense de la politique
La politique est une seconde nature dans ma famille. Pour peu qu'on veuille y échapper, elle vient immanquablement vous happer avec hargne. Autant donc être au coeur de la politique et de tenter au mieux de la dompter. Ce n'est pas chose aisée et chaque jour présente de nouveaux défis et combats. Il paraîtrait que j'use de mon pouvoir d'une main de fer et je trouve l'image assez juste. Le pouvoir n'a jamais rien de tendre, bien fou qui l'oublie !

→ Ce que je pense des jeux
Publicola m'ont-ils nommé. J'arbore ce surnom avec fierté mais j'ai en vérité beaucoup de mépris pour les jeux. Ils ne sont qu'un outil pour me conserver l'amour de la population. Si je dois y assister, je m'y ennuie mais je ne peux y couper car certaines négociations se font autant lors d'un combat dans l'arène que lors d'un débat au sénat.

→ Mes souhaits, mes rêves, mes ambitions
Mon ambition a toujours été de faire de Pompéi une cité prospère et je pense m'y employer encore de nombreuses années. Bien entendu, derrière l'idéal se cache une ambition politique sans limite. Je ne laisserai jamais le pouvoir à quiconque, sans combattre, avec des moyens honorables ou vils, qu'importe. Mon argent me permet bien des rêves et toujours ils se réalisent...

→ Ma pire crainte
La chute, comme si elle était ancrée dans la fortune de notre nom. Le grand Pompée eut beau s'élever, il n'en tomba pas moins. Et au nord, s'élève le grand aigle Auguste, dont les rayons semblent venir vouloir nous brûler les ailes, jusqu'ici.

→ Heureusement, les Dieux veillent sur moi.
Ou tout du moins semblent-ils le faire en effet. Je n'ai jamais eu à me plaindre d'eux ou si, dernièrement, lorsque ma plus jeune fille embrassa la carrière de vestale. Honneur insigne bien entendu mais au goût un peu amer. Je me plais à honorer les Pénates, car garder ma famille en sécurité me tient à coeur, plus officiellement Vesta pour les mêmes raisons, ainsi que Vulcain peut-être à la fois pour mon tempérament mais aussi pour continuer à forger un avenir durable à ma cité et ma famille.

"Familia sempiterna est"

La famille est éternelle dit-on. La mienne semble pouvoir l'être en tous cas que ce soit par volonté divine ou par celle des hommes. Nombreuse et influente, elle donna le nom de la cité qui émerveilla mes yeux de nourrisson. Tout le monde sait que je suis le petit neveu de Pompée et j'arbore ce nom comme une gloire, malgré les railleries depuis la chute de celui-ci. Qu'importe, le nom lui est toujours là et si à Rome il ne revêt plus le lustre d'antan, ici est-il encore prononcé avec déférence.
Lorsque je contemple la mer, depuis la villa des mystères, je me prête parfois au jeu du simple patriarche de ma maison. Que ne puis-je rester là à admirer les pas mesurés de mon épouse, qui discute de sa future apparition publique et de la couleur du voilage qu'elle choisira alors ? Ou encore écouter mon fils, ressasser les grandes batailles que menèrent de concert César et Pompée... Cet artifice ne peut malheureusement durer qu'un temps : si j'aime mon foyer plus que tout et que je suis prêt à le défendre tel un lion, c'est au coeur du sénat que je me sens le plus utile. De plus, si notre famille semble florissante et sans taches, les apparences sont trompeuses : j'ai navré ma fille aînée dans un mariage politique, la plus jeune préféra se faire vestale plutôt que de subir le même sort et mon propre neveu doit passer pour mon fils. La triste vérité est que nous brillons surtout grâce à l'or que nous amassons et aux intrigues que nous tendons dans les sombres couloirs.

"Velle, est posse"

Vouloir, c'est pouvoir disait mon père et je crois avoir surtout retenu le mot "pouvoir" dans cette citation fort pompeuse. Je fus élevé dans cette idée qu'un jour le pouvoir me reviendrait, que je serai maître du beau et mauvais temps sur la cité entière. Encore gosse, je m'imaginais cela aussi facile qu'on imagine défaire ses ennemis sur un champ de bataille avec ses soldats de bois. Un bon coup du plat de la main et les voilà tous par terre, quémandant grâce. Mais si mon grand-oncle nous parlerait stratégie d'outre-tombe et qu'une bataille ne peut être remportée sans, j'ai appris, à mes dépends et très jeune, qu'il en est de même en politique. Pouvoir, ce n'est pas seulement vouloir justement, c'est vouloir sous certaines conditions. Alors que j'étais jeune patricien et que je siégeais pour la première fois au sénat de Pompéi, je pris la parole pour dire que nous n'avions qu'à écraser une révolte populaire dans le sang et les armes. Qu'ils nous craignent, s'ils sont incapables de nous aimer, voilà mes propres mots. Si l'on ne se moqua pas de mes propos à découvert ce jour là, c'était seulement par égard pour mon père, alors sénateur respecté. La jeunesse est impérieuse et vindicative me dit-il, le soir-même, mais sache que ce n'est pas l'ire de la foule que tu dois redouter, c'est l'attaque de tes ennemis qui comploteront dès lors que l'amour de la plèbe ne te sera plus acquis.
Ce conseil n'est pas tombé dans l'oreille d'un sourd. Caresser la population dans le sens du poil, je m'y emploie depuis lors en nourrissant les affamés, en les rassasiant de pain et de jeux, quitte à les abrutir à force de combats de gladiateurs.

"Vim ad delendos adversarios meos mihi da"

Quant à mes ennemis, je ne les oublie jamais car je sais qu'ils attendent tous que nous trébuchions pour nous planter un glavius entre les omoplates. Ils rêveraient de recouvrir le sol du sénat avec le sang des Pompeii, comme il en fut des Julii à Rome. Bien que je ne déplore guère personnellement la mort de celui-là, la mienne me navrerait beaucoup et je me tiens constamment sur mes gardes. Les Licinius redorent leur Fortune plus encore chaque jour. Je me surprends même à prier pour que Caius n'ait jamais d'héritier - quoiqu'il serait bien capable d'adopter Tiberius, rien que pour me dépiter - ou qu'il reparte à Rome s'y faire assassiner sur un quelconque champ de bataille : ne serait-ce pas mourir avec panache et gloire ? Ne serait-ce point faire montre d'une extrême débonnaireté que de me laisser les coudées franches, au sénat comme en ville ? Donne-moi la force d'anéantir mes ennemis, voici ce que je murmure parfois à Vulcain... Lui ne m'a pas encore murmuré en retour que mon héritier n'est autre que le fils de mon ennemi. Si cela advenait un jour, rien ne pourrait arrêter la guerre civile qui ravagerait alors Pompéi.