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 NEMETORIA LOREIA OVIDIA ₪ Je veux savoir comment je m'y prendrai, moi aussi, pour être heureuse. || 100%



POMPEII, TERRA DEORUM ₪ :: Population recensée
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Patricien
Mar 12 Fév - 22:39
NEMETORIA LOREIA OVIDIA ₪ Je veux savoir comment je m'y prendrai, moi aussi, pour être heureuse. || 100%   




Nemetoria Loreia Ovidia
₪ Arrivée à Pompéi : 22/08/2012
₪ Ecrits : 1428
₪ Sesterces : 10
₪ Âge : 18 ans.

Cogito ergo sum ₪
₪ Citation: « Chacun de nous porte en lui le ciel et l'enfer. »
₪ Moi en quelques mots:
₪ Côté Coeur: Mariée à Cnaeus Loreius Tacitus.
Nemetoria Loreia Ovidia
http://derouleurdepensees.tumblr.com/
NEMETORIA LOREIA OVIDIA ₪  Je veux savoir comment je m'y prendrai, moi aussi, pour être heureuse.  || 100% Empty

 
 
Nemetoria Loreia Ovidia
incarnée par Emilia Clarke
Ave, étranger ! Je suis Nemetoria Loreia Ovidia, fille de Marcus Nemetorius Flavus. Née à Rome, il y a dix-huit ans, je suis d'origine romaine. La déesse Fortune a fait de moi une patricienne et j'ai pour famille Cnaeus Loreius Tacitus, mon mari, Loreia Minor, ma belle-soeur, et Marcus Nemetorius Flavus, mon père demeurant encore à Rome.
 

  Plus de 2000 ans plus tard, c'est Athos qui m'incarne. Qui es-tu ? Nolwen de mon vrai nom, née en 95 (ouais parce que l'âge ça change tous les ans !), étudiante en études théâtrales, metteur en scène et marionnettiste en voie de professionnalisation, co-fondatrice du forum et schizophrène de l'extrême, pour vous servir. Lunettes
   Si je venais malheureusement à quitter le forum, que le staff le fasse disparaître de Pompéi par mort ou départ, et ce pour permettre à mes liens importants de ne pas être gênés. Mais ça n'arrivera pas.  Fou

 
© crédit tumblr

 
Pompéi & moi
  mon opinion, mes croyances, mes ambitions
→ Ce que je pense de Pompéi
   Pompeii est la cité de mon époux et de tous les Loreii, gens dont je fais à présent partie et dont mes fils seront. Elle n'a certes pas la grandeur de la Rome qui m'a vue naître et grandir, mais l'air y sent bons les embruns marins et s'agite en elle un tourbillon de vie qui n'est pas sans me plaire. Mais je n'ai pas encore réussi à aimer cette ville, comme je ne peux me résoudre à la haïr. Cette ville a emporté mon innocence dans ses dédales de ruelles sombres, elle a perdu ce que je pensais être moi dans ce qu'elle cache. Cette ville a vu mon mariage et ma déchéance, mais je l'applique à l'adorer car elle sera j'en suis sûre le théâtre de ma palingénésie.

   → Ce que je pense de la politique
   La politique n'est pas le jeu des femmes, ou du moins certains le prétendent-ils. Ceux-là me font rire. Si nous n'avons pas notre place à la guerre, pour diriger la cité nous sommes les fourmis de l'ombre. J'ai souvent entendu les messes basses de mon père avec un autre de ces sénateurs romains quand pour afficher sa réussite familiale plus que pour me faire plaisir il me conduisait aux jeux du cirques. J'ai toujours vu amusée les bijoux qui recouvraient les bras et les nuques des patriciennes quand lors des grandes soirées tous venaient faire l'étalage de leurs richesses. J'ai assisté ma mère quand souriante et aimable elle faisait patienter les clients de mon père venus le rencontrer. Nos sourires sont politiques, nos vêtements, notre façon de pencher la tête sur le côté... La politique est séduction, et il n'y a que les femmes pour exceller en cela. Nous ne faisons pas de politique à proprement parlé, mais seul un homme avec à ses côtés pourra espérer gagner à ce jeu.
   
   → Ce que je pense des jeux
   De toujours à jamais j'ai toujours adoré les jeux. Tous les jeux. Quand ces fêtes commençaient, j'étais toujours ravie. Et ce que j'aime le plus, ce sont les combats de gladiateurs. Je suis portée par la foule en délire, j'aime voir ces combats, ces courses et oublier le reste ; je trouve cela grisant. Enfant, je rêvais de ces femmes gladiateurs, qui avaient tant de force et de courage. J'aurais rêvé en être une... Le jour où cela vint aux oreilles de ma mère, je ne pus plus aller aux jeux pendant près d'un an.

   → Mes souhaits, mes rêves, mes ambitions
   Il y a tant à faire ! Mes ambitions ? Redorer le nom de mon époux et de mes fils, lui rendre la place qu'il doit avoir, et raviver l'admiration qu'il doit faire naître. Mes rêves ? Donner des fils à mon époux.

   → Ma pire crainte
   Le poison. Le poison qui brûle mes veines et me conduit à la folie. Plus jamais ça, plus jamais cette nuit noire et ce froid, cette solitude glacée et cette odeur de mort. Ou la maladie. Je ne veux plus veiller personne comme j'ai veillé ma mère. Je crains que la fièvre prenne Tacitus ou mes fils si j'en ai comme elle l'a prise elle. Et ne plus pouvoir enfanter. Comme ce poison de mort me fasse perdre à jamais ce droit, ce devoir, cette chance que j'ai de pouvoir faire naître des enfants.

   → Heureusement, les Dieux veillent sur moi.
   J'ai peur de ne pas être la plus pieuse des femmes. Je célèbre les dieux comme tous le font et le doivent, et mes prières leur sont souvent adressées. Mais le plus souvent je prie selon mes désirs du moment, et non par simple vénération. Enfant, je priais Bacchus, pour que le dieu de l'ivresse et de la fête rende mes jours plus heureux. Quand ma mère est tombée malade, j'ai prié Esculape pour qu'il la sauve de la maladie. Quand je me suis mariée, j'ai prié pour Junon pour que mon mariage soit réussi, pour Venus pour que l'amour y naisse. Depuis peu j'ai doublé ces prières par certains adressées à l'amant de cette dernière et à Minerve, car il me faudra bien l'aide de Mars et de la déesse de la sagesse pour réussir ce que j'entreprendrai pour ma famille.

  → Ce que je pense du "Fils de l'Etna" et de sa révolte
  Je ne pense pas, j'écoute. Je ne suis que le reflet des pensées et positions publiques de mon époux. Pourtant, en mon fort intérieur je m'interroge. Je n'ai jamais moi-même maltraité mes esclaves, cependant je les pas traités comme mes égaux. Mais je suis patricienne, fille de citoyen, et ceci par la volonté des dieux, aussi je ne vois pas ce que je pourrai bien me reprocher. Je me demande si, parmi le sang versé par cette armée improvisée d'esclaves rebelles, il n'y aurait pas celui d'autres comme moi, dont la seule erreur et d'être nés plus haut. L'équilibre de notre société repose sur cette domination que les citoyens ont sur leurs esclaves, c'est elle qui a permis notre grandeur. Et je ne crois pas que le fils d'Etna soit un demi-dieu, seulement un esclave qui a oublié sa place.
 
© fiche par born.to.die


Dernière édition par Nemetoria Loreia Ovidia le Dim 29 Mar - 17:50, édité 20 fois
Patricien
Mer 29 Oct - 15:06
Re: NEMETORIA LOREIA OVIDIA ₪ Je veux savoir comment je m'y prendrai, moi aussi, pour être heureuse. || 100%   




Nemetoria Loreia Ovidia
₪ Arrivée à Pompéi : 22/08/2012
₪ Ecrits : 1428
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mon histoire
A qui se vendre ?
   

I. « Si je dors, qui me donnera la lune ? »

Amatia Nemetoria Lupida était extraordinairement pâle au côté de son époux. Si elle souriait et se montrait enjouée, aucun des invités ne pouvait être dupe de la fièvre et de la fatigue qui rongeait la patricienne dont le regard clair allait sans cesse vers les appartements où se trouvait sa fille. La crainte la dévorait depuis des jours, et alors que le Dies Lustricus de l’enfant arrivait enfin, elle tremblait. En huit ans, la louve avait perdu deux filles et trois garçons, quatre d’entre eux avant d’avoir pu les nommer, et le dernier n’avait même pas vécu un an. Depuis la naissance de sa fille, elle avait peu dormi et avait tenu à la veiller autant que possible ; la quitter pour aller accueillir leurs invités venus pour ce jour lui coûtait énormément bien qu’elle se forçait à rester charmante et affable. L’accouchement avait été éreintant, et elle avait tant saigné qu’elle craignait de ne plus jamais pouvoir porter la vie. Cette fille, c’était sans doute sa dernière chance ; cette fille, elle ne laisserait pas les dieux l’avoir.

Enfin arriva l’heure. Sa sœur alla chercher l’enfant, et Flavus annonça d’une voix claire qu’elle était leur fille, la fille de Rome. Nemetoria Ovidia, l’Agneau.

*
**
*

Le nom donné par les parents paraissait avoir été une prédiction divine. Nemetoria Ovidia, à huit ans, avait les cheveux d’un blond cendré, presque blanc, qui caractérisait sa famille, mais aussi une peau si blanche et pâle que l’on semblait par endroit y distinguer ses veines. En plus de ce physique qui s’accordait à son cognomen, sa candeur et sa douceur enfantine semblaient pousser à des extrêmes si extraordinaires que cela semblait être un fait exprès. L’enfant avait un caractère des plus doux et faciles, et était toujours joyeuse, comme une petite fille peut l’être quand la vie la comble dès sa naissance d’autant de bienfaits. Il arriva une anecdote que nous allons compter, seul véritable nuage de ses jeunes années – et encore que de part son jeune âge et sa naïveté il serait difficile d’y voir un véritable mal mais plutôt une folie de son imagination que l’on sait si féconde en ces âges.

Il se trouvait parmi les clients de Nemetorius Falvus un laniste, le pater familias s’en était entiché en partie en raison de son grand amour des jeux du cirque, et de la certitude qu’il avait qu’il n’y avait pas mieux pour gagner les faveurs de la plèbe que d’offrir des spectacles du genre. Il s’était trouvé que, malgré la désapprobation de Lupida qui n’avait jamais apprécié ces spectacles leur préférant le théâtre et la musique, un concours de circonstances qu’il serait trop long ici au lecteur fit qu’il emmena assez jeune sa fille voir les gladiateurs combattre, et à la demande de cette dernière, la conduisit encore avec lui quand il allait trouver ce laniste pour affaire, pour qu’elle puisse assister à l’entrainement des gladiateurs. Du reste, ce premier fait présenté ici comme une chose incongrue ne l’était pas tant que cela, les ludi étaient le rendez-vous de toute la cité, et bien qu’encore assez jeune, Ovidia n’avait pas causé de souci quelconque. En revanche, à moitié par mimétisme de son père qu’elle adorait sincèrement, à moitié par goût tout personnel, elle s’était prise de passion pour la gladiature, et ne jurait presque que de cela, au grand désespoir de sa mère.

A huit ans, alors qu’elle assistait pour la troisième fois de sa vie à ces ludi, elle eut la joie d’y voir des femmes combattre. Les combats de gladiatrices la fascinèrent plus encore que n’importe quoi d’autre, et en rentrant dans la domus familiale, elle demanda à sa mère si elle pourrait un jour elle-même se battre dans l’arène. Cela était, comme on peut s’en douter, une fantaisie toute enfantine, une rêverie des plus ingénues, mais qui provoqua chez la belle louve une colère aussi terrible que disproportionnée. Mais à cette réaction étrange, l’enfant répondit par une autre, tout aussi invraisemblable. Elle que l’on connaissait si douce et sage plongea dans une rage noire et terrible, et détruisit de fureur un magnifique vase appartenant à la famille de sa mère depuis plusieurs générations. On mit à cette époque cette réaction sur le compte de l’incompréhension de la fillette, et bien qu’on la privât de jeux pendant toute une année à la suite de cette crise, on n’y pensa plus. Pourtant, le lecteur se doute que pour que nous portions à son attention ce conte au demeurant banal, c’est que nous avons quelque chose à en dire. En effet, car si personne ne s’inquiéta de cette colère subite et si extraordinaire, celle-ci était en fait intrinsèque au caractère même de l’enfant. Ainsi, comme il nous sera permis de le démontrer plus en détail par la suite, tant que la Fortune comblait Ovidia, elle avait tout d’une sainte. Pourtant, au moindre obstacle, sa nature profonde pouvait ressortir, une nature bien plus sombre que ne laisserait supposer sa candeur apparente ou son cognomen. L’Agneau ne l’était que dans ses bons moments, mais une fois contrariée elle devenait plus terrible encore qu’une louve. Cependant nous ne nous attarderons pas plus pour le moment, car la suite du récit sera nous en sommes sûrs bien assez éloquent, et que de toute façon ce fut la seule fois avant son arrivée à Pompeii – bien qu’étrangement elle eut rencontré des obstacles terribles à son bonheur avant, qu’elle ne manifesta un caractère si différent de celui qui semblait être le sien.

Du reste, inutile de s’attarder plus longtemps sur cette enfance heureuse. Peut-être pouvons-nous préciser que Lupida tenait entre autre son cognomen de sa nature hyper protectrice, et qu’elle fut tout au long des jeunes années de sa progéniture une mère des plus aimante et prévoyante, qui ne supportait pas d’être séparée de son enfant chérie plus de quelques heures. Nous avons déjà établit que la petite fille adorait son père, nous préciserons qu’elle aimait encore plus sa mère, et qu’elle lui vouait une sorte d’admiration grandiose.

Mais, lorsqu’Ovidia eut atteint ses onze ans, et alors qu’elle n’allait pas tarder à devenir nubile et, sans doute, se marier et partir, un terrible mal se mit à ronger Amatia Nemetoria Lupida.

II. « Le soleil des vivants n’échauffe plus les morts. »

Le mariage entre Marcus Nemetorius Flavus et Amatia Lupida avait été un mariage arrangé, comme il y en avait entre les patriciens. Ces deux familles avaient voulu s’unir dans la jeunesse des deux jeunes gens, et avaient envoyé convolée en belles noces le seul fils du pater familias des Nemetorii et la fille cadette des Amatii. Ils avaient bien des années plus tard regrettés cette union il est vrai, quand les Nemetorii s’étaient liés à la cause d’Auguste et les Amatii à celle de Marc Antoine. On avait à ce moment-là cessé de se côtoyer, au grand désespoir des sœurs Amatii à présent ennemies par les alliances de leur père et de leurs époux respectifs. Cependant pour Lupida, il y avait eu une consolation. En effet, bien qu’elle n’ait au départ aucune inclination particulière pour son époux, elle avait trouvé en lui un caractère à la fois semblable et complémentaire au sien, et un véritable amour était né entre eux.

Aussi, la maladie commença à ronger Lupida, la tragédie fut totale dans la famille, car l’époux comme la fille ne pouvait imaginer un instant de leurs vies sans elle. Quand Ovidia supplia son père de ne pas la marier tant que sa mère de serait pas guéri, Flavus, qui avait pourtant déjà commencé à parlé fiançailles avec un vieil ami à lui au sujet de leurs enfants respectifs, accepta sans faire d’histoire, et veilla lui-même, autant qu’il le pouvait sans négliger ses obligations, son épouse.

Le mal fit sombrer dans un état de faiblesse infinie Lupida pendant plus de six ans. Il était chronique, et elle passait de périodes où elle ne pouvait quitter le lit, le plus souvent inconsciente, à des moments où elle semblait à nouveau en bonne santé, rapportant espoir dans les cœurs de ses proches. Mais ces phases, déjà relativement courtes au début de la maladie, se firent de plus en plus rares et de plus en plus brèves au fil du temps.

Pendant ces années, Ovidia fut la garde malade la plus dévouée de tout Rome. Jamais un jour elle ne manqua au chevet de la malade. Elle n’alla plus aux jeux, et ne sortit plus que pour de rares occasions. Elle devint la fillette la plus consciencieuse et attentive au monde. Un simple geste de la malade et elle s’agitait, elle la comblait de tout son amour, ton son zèle enfantin. Elle craignait de perdre sa mère d’une façon si violente qu’elle la rendait fébrile, tremplante. Sa douleur, sa tristesse, sa peur aggrava ses traits fins, et elle parut pendant ces années-là elle-même malade tant elle était pâle et ardente. Elle eut finit sans doute par se dessécher sur place, par perdre sa beauté naissante et sa fraicheur et se ratatiner sur elle-même n’eut été des quelques visites qu’elle recevait encore. Privée quasiment de tout contact et de divertissement – sans lesquels, on le sait, les adultes deviennent fous et les enfants deviennent secs et sombres, presque laids – elle n’eut sans doute pas tenu le choc de ces terribles années sans le soin que prirent certaines de ses relations à ne pas la laisser se perdre dans sa géhenne malheureuse. Enfant nous l’avons dit, elle était enjouée et facile à vivre, et elle avait tissé des liens assez forts avec quelques jeunes gens de son âge ou à peu près qui s’étaient entichés de cette nature tendre et candide. Parmi ceux-là, il en resta qui survécurent à ces années d’emprisonnement volontaire, et lui rendirent même visite régulièrement. Ils la sauvèrent. Ces noms sont peu nombreux, mais nous ne les citerons pas tous. Parmi eux cependant, nous pouvons noter une jeune vestale de quelques mois la cadette de notre blonde. Claudia Cassia était la fille d’une connaissance proche, si ce n’est d’une forme d’amie mais nous ne nous avancerons pas trop, d’Amatia Lupida. Si la louve n’avait pu garder de liens forts avec sa propre famille dans le long terme pour ne pas déplaire trop à celle de son époux, elle avait continué de voir cette femme et ses enfants, emmenant avec elle la jeune Ovidia qui s’était très vite attachée à la brunette. Cassia, devenue vestale, s’était la première précipitée dans la villa des Nemetorii en apprenant l’affliction de la mère de son amie. Ses prières à Vesta avaient été une espérance salvatrice pour l’agneau, quasiment jusqu’au bout, qui n’avait jamais été si pieuse que pendant le temps de ce mal terrible.

Mais alors qu’elle avait dix-sept ans passés, les Parques coupèrent le fil de la vie d’Amatia, plongeant la famille déjà rongée par la douleur de savoir l’une des leurs si terriblement atteinte dans le désespoir absolu du deuil. Ovidia ne pleura pas, elle avait trop versé de larmes pendant la longue agonie qui avait précédé ce dénouement inévitable. Mais en elle, quelque chose se brisa à jamais. Le chagrin donna un éclat extrêmement particulier à ses yeux céruléens qui ne devait plus jamais disparaître. Le deuil la transforma. Elle regarda les pleureuses avec une gravité épouvantable, elle assista sans un mot à tous les rites funéraires jusqu’à l’incinération.

Marcus Nemetorius Flavus, au milieu de sa tristesse infinie, ne put s’empêcher de remarquer combien ses épreuves avaient vu sa fille changer. Il la trouva effroyablement belle dans ce malheur qui les frappaient, et sans savoir exactement comment, en arriva à repenser pour elle au mariage, et ce le plus rapidement possible. Une fleur blanche avait éclos devant lui, et il avait peur de la voir faner avant d’avoir goûter aux rayons du soleil.

III. « Là où tu es, Gaius, moi, Gaia, je veux être. »

Le précédent mariage avait été oublié depuis longtemps par l’ami de Flavus, et celui-ci dut penser à une nouvelle alliance. Il y avait parmi ses amis un homme, un pompéien, un vieux soldat que le patricien avait toujours autant admiré qu’abhorré. Sans croire particulièrement en lui, Flavus qui avait eu l’occasion de rencontrer son fils unique, de dix ans l’aîné de sa fille, lui avait proposé un mariage entre leurs enfants. La seule raison qu’il avait avancé était cette impression étrange que lui avait fait Tacitus, le fils de son ami, et qui lui avait rappelé son Ovidia endeuillée. Il croyait en leurs noms, il croyait en l’héritier. Cela suffisait. Le mariage fut évidemment accepté, les Nemetorii jouissant d’une certaine influence en Rome, et les Loreii, famille en question, ayant perdu depuis quelques années la leur dans leur paisible cité. On prononça les fiançailles, malheureusement la jeune promise tomba malade au moment de rencontrer son époux qui dut quitter Rome où il était venu la voir. Quand Nemetoria Ovidia quitta sa cité, c’était pour épouser le lendemain de son arrivée un homme qu’elle n’avait encore jamais seulement vu, un inconnu total.

A l’annonce de ses fiançailles par son père, elle n’avait pas seulement prononcé un mot. La femme – car la fillette s’était transformée pendant la maladie, avait seulement levé ses yeux cristallins vers son père et avait eu pour lui un sourire triste et un hochement de tête. Pourtant, si elle ne s’était confiée à personne à ce sujet, elle était profondément effrayée. C’est avec une angoisse indicible qu’elle avait quitté Rome pour se rendre à Pompéi, craignant tout de la ville, et surtout, craignant tout de son mari. Elle le savait d’une jeunesse encore fraiche, homme fait dans la fleur de l’âge, puisqu’elle venait d’atteindre ses dix-huit ans et qu’il n’en avait que vingt-huit. Mais le reste était pour elle mystère. Etait-il bon, était-il beau, était-il vrai, était-il fort ? Pourrait-elle l’aimer, ou tout du moins s’y attacher ? Ou lui ferait-il horreur et honte chaque jour de sa vie ? Ces questions la torturaient sans cesse. Pas à un seul moment elles ne la laissèrent en paix depuis le jour où son père annonça ses fiançailles prochaines au jour de son mariage. Elle tremblait d’être malheureuse, car après ces épreuves traversées elle attendait des dieux qu’elle avait tant prié sa part du bonheur. Et un instant en le voyant pour la première fois, elle pensa que ses prières avaient été entendues.

Cnaeus Loreius Tacitus était le fiancé. Âgé de vingt-huit ans, c’était généralement un mutique, mais son regard d’un bleu très sombre semblait pénétrer toutes choses et tous êtres. S’il ne parlait que fort peu, ce regard-là était plus éloquent que toutes les paroles du monde, et ses mains blanches et fines parlaient aussi avec lui. Du reste, les rares fois où il ouvrait la bouche, il était admirablement talentueux dans la rhétorique, et s’exprimait d’une voix grave et profonde. Il était beau aussi, au-delà de toutes les espérances de sa fiancée. Et dès le premier regard, celle-ci devina en lui une grandeur d’âme qui ne souffrait aucune comparaison parmi tous ceux qu’elle connaissait. Elle ne l’aima pas dans l’instant qui suivit leur rencontre, elle l’adora jusqu’à la folie.

Du reste, celui-ci était affublé d’un père bègue et méprisé, que Flavus appréciait pour sa droiture et détestait pour tout le reste, et d’une sœur rousse sur laquelle de nombreuses rumeurs courraient quand à sa naissance.

Tacitus ne se montra pas très chaleureux avec sa fiancée, avec sa femme plutôt devrait-on dire car leur rencontre fut très brève la veille de leurs épousailles, mais il la détailla comme s’il tentait de jauger jusqu’à son cœur. Leurs échanges furent succincts même le jour de la cérémonie, mais il se dégageait une chose étrange de ce couple juste formé. Une sorte de force qui ne se dévoilerait que bien plus tard. Ovidia se prit à rêver qu’ils s’aimeraient follement, et lors de leur première nuit ensemble, elle se donna à lui sans même un tremblement.

Ils étaient allongés, encore entrelacés dans leur première étreinte d’époux quand une voix appela Tacitus. Blaesus, le pater familias, souffrait soudainement d’un mal terrible.

IV. « Il fait froid dans ton cœur, il fait froid dans ton entourage. J'ai froid auprès de toi. Je meurs de froid. Je meurs d'Amour. »

Quelle curiosité terrible, le mariage.
Cette union de deux corps qui n’ont rien demandé, de deux êtres, ce lien sacré devant les hommes comme devant les dieux, cet ajout soudain à deux existences et à celles qui y sont rattachées. A l’homme, on ajoute une épouse, une compagne de couche, une mère pour ses fils, un joli visage à son bras pour quand il se montre en société. A la femme on ajoute un nom, une famille, une nouvelle existence, une nouvelle identité, un père pour ses enfants, un compagnon de couche qui la terrifiera la première nuit, un compagnon de vie qu’elle devra toujours appuyer, à qui elle se devra d’être fidèle et loyale, qu’elle se devra d’aimer, ou en tout cas d’en avoir l’air.

Elle n’avait rien fait de mal, au fond.
Sois loyale à ton homme. Sa loyauté pour Tacitus était déjà sans faille ; elle se voulait déjà être un rocher, une montagne sur laquelle il pourrait s’appuyer, toujours présente, toujours forte. Ne lui fais pas honte. Quelle honte Nemetoria aurait-elle pu faire aux Loreii ? Elle leur était arrivée d’une grande famille de Rome, elle avait une dot très importante, des relations, elle était belle et discrète sans être dépourvue d’intelligence, elle s’était montrée calme et patiente, tempérée, douce : elle représentait cet idéal de la femme patricienne modèle, celle qui semble née pour aimer son mari, le servir, et adorer ses enfants. Sois gentille avec lui, et reste disponible à ses envies. Elle n’était que sourires pour Cnaeus, elle ne s’était jamais permis d’aller contre lui, elle s’était fait ombre appliquée de son époux ; et malgré sa peur, elle s’était offerte à lui presque sans trembler lors de leur première nuit, et elle avait été dans leur couche toutes les suivantes…
Ce n’était pas sa faute s’il n’était pas venu.

La douleur la fit soudain suffoquer. Ovidia se tordit sur le sol, arrachant  des lambeaux de tissus à sa palla. Elle sentait la sueur sur son front, et sur tout son corps, collant le vêtement à sa peau blanche. Elle se savait fiévreuse, elle sentait ses pommettes et ses mains glacées mais son front et son souffle brûlant. A dix mètres d’elle, une foule d’esclaves et de guérisseurs en tout genre s’affairaient autour d’un vieillard qui n’en finissait pas de mourir, Cnaeus Loreius Tacitus lui-même délaissait le monde entier pour veiller son père ; ignorant que la jeune épousée se sentait dépérir juste à côté d’eux, qu’elle nécessitait tout autant de soins que l’aïeul, plus peut-être car elle devait vivre pour donner un fils au jeune dominus, qu’elle n’avait pas vingt ans et bien plus de chances de guérir. Au lieu de les appeler, la romaine étouffait ses sanglots et ses cris. Personne ne viendrait la trouver cette nuit, elle le savait bien. Elle resterait ainsi jusqu’à ce que l’épuisement ait raison d’elle, comme toutes les nuits depuis qu’elle avait bu ce poison infâme. Cnaeus ne passerait pas seulement dans le cubiculum qu’ils partageaient pour la trouver évanouie sur le sol, les vêtements déchirés et des perles de sueur sur son visage trop pâle. Il n’avait pas même remarqué sa pâleur ces dernières semaines, quoiqu’elle l’ait régulièrement craint. Elle s’était faite excuser se plaignant de divers maux bénins quand il avait du sortir, notamment chez les Licinii, et personne ne s’était inquiété de ce qu’il en était réellement. Certains esclaves pensaient qu’elle avait surtout le mal du pays, et qu’elle devait mal vivre ce nouveau mariage, d’autres qu’elle était enceinte, quelques uns qu’elle souffrait d’indigestion ou quelque chose du genre ; pour la grande majorité ils étaient trop occupés avec le pater familias pour s’occuper de cette étrangère qui ne le souhaitait pas et qui recherchait la solitude. Nervius avait fait part à sa domina de ces rumeurs qu’il avait entendu parmi les esclaves, et elle s’était demandé, songeuse, si Cnaeus en avait oui quelque chose lui aussi.

Quelle chose surprenante, le mariage.
Quand on devient épouse, ou qu’on se sait fiancée, on met sans cesse cet homme au centre de nos réflexions. On s’interroge, on se questionne à son sujet, au sujet de ce qu’il pense, de ce qu’il ressent, de ce qu’il veut, de ce qu’il espère. La patricienne aurait tué pour un aperçu de ce qu’il se passait dans l’esprit de son époux. Elle craignait avant toute chose de lui avoir déplu d’une façon ou d’une autre, ou que quelqu’un ait calomnié sur elle dans son dos auprès de lui. Cette pensée la tuait aussi certainement que le poison qu’elle avait avalé. Elle appartenait à Tacitus, aussi certainement qu’une esclave, il avait mis son nom sur elle, il s’était lié à elle en faisant couler on sang la première nuit. Il était devenu le centre de son univers. Elle devait lui faire honneur, elle devait porter ses fils, elle devait devenir la domina dans sa maison. Un corps chaud dans son lit, une vision à son bras, une main toujours tendue vers lui, des lèvres pour répéter ses mots…

Elle avait beaucoup saigné les premiers jours. Elle avait tant bien que mal essayé de le dissimuler, la vie qui s’échappait d’elle-même. Elle avait pris peur en voyant cette quantité de sang qu’elle perdait, mais elle s’était rassurée en songeant à ce qu’elle s’était fait, à l'avorteur, à sa liaison coupable avec un gladiateur (acte certes répandu chez ses consœurs patriciennes, mais souvent source d'infamie), au bâtard qu'elle avait très certainement porté avant même de porter son fils, à la mort qu’elle avait emmené dans son ventre. Les saignements étaient passés, mais pas la douleur, pas la fièvre. Elle sentait ses veines brûlantes, elle arrachait des lambeaux de tissus pour retenir ses cris d’agonie, ses gémissements. Elle avait porté en son ventre le fils d’un autre, et à présent sa rédemption passait par une douleur qui la conduisait presque à la folie. Les jours se mélangeaient dans son esprit, elle était incapable de dire quand elle avait été voir l'avorteur exactement. Tout était vague. Elle était dans son cubiculum, dans le noir, sur le sol à côté de sa couche. Nervius était libre ce soir, et elle était seule, et elle souffrait, et elle ne pouvait le faire partager à personne. Des spasmes la secouèrent, et ses mains tirèrent un peu plus sur sa palla déjà déchirée. Et soudain, tout se calma. Elle tremblait doucement, et elle sentait toujours le feu dans ses veines, mais il lui semblait tout à coup que son front devenait froid, que les spasmes devenaient moins violents.

Quelle chose étrange, le mariage.
Cet attachement que l’on impose aux êtres. Et qu’ils acceptent. Parce que la jeune patricienne avait accepté cet attachement qu’on lui avait demandé d’avoir pour son époux. Plus que cela, elle s’était convaincue qu’elle l’aimait, qu’elle l’aimait vraiment, et tout avait appuyé cette décision qu’elle avait prise. Après des mois à trembler en songeant à ce que pourrait être cet homme à qui on voulait la donner, elle l’avait découvert avec émerveillement. Elle avait d’abord aimé son visage, ses traits harmonieux, ses lèvres fines et rouges, puis elle avait aimé cette profondeur qu’il avait dans le regard, ce silence habituel qui rendait chacun de ses mots plus puissants que tous les discours du monde, sa modestie et sa simplicité quand il ne se parait que de sa toge en laine blanche pour sortir là où tous les autres patriciens se couvraient de bijoux et de dorures pour se faire valoir, se montrer. Cnaeus Loreius Tacitus, son époux, paraissait ne rien vouloir prouver à personne, tout en prouvant tout en permanence. Elle voyait sa grandeur qui étouffait sous les ruines d’une maison jadis grande – bien assez en tout cas pour que Nemetorius donne son unique enfant à ce garçon mutique, mais il lui semblait aussi voir dans les yeux de son époux mille plans ingénieux pour reconstruire cette villa. Tout cela, elle le sentait en elle les rares moments où elle le croisait, c’était une certitude qui résonnait dans tous son être, et qui la forçait à l’admiration et à l’amour. Mais tout cet amour ne semblait trouver aucun écho chez son époux qui restait de glace en sa présence. Et très lentement, ce froid était entré jusque dans le cœur de la patricienne, l’abîmant peu à peu. Elle voulait l’aimer, mais le temps et le silence avait entaché son espoir, avait entaché son amour, et celui-ci s’endormait lentement pour laisser place à quelque chose de totalement nouveau chez elle.

La romaine s’était levée lentement, et lavée le visage. Elle avait besoin d’air, et il lui semblait que l’odeur de la mort s’était incrustée jusque dans sa peau. La mort qu’elle avait donné ; qu’elle s’était donnée l’idiote. Ses pas n’étaient plus sûrs, et ses mains tremblaient quand elle quitta le cubiculum. Passant dans l’atrium, elle entendit les rumeurs des râles de Blaesus qui se raccrochait à la vie avec détermination. Qu’il meurt, qu’on en finisse. Que cette vie là finisse. Elle n’en pouvait plus des malades, et elle ne souhaitait pas aux enfants Loreii ce qu’elle avait vécu pendant des années.
La visions de sa mère pâle, fièvreuse, tremblant et gémissant lui revint à l’esprit. Elle guérira bientôt, elle doit guérir bientôt. Elle s’était accrochée à cet espoir pendant cinq ans, et elle avait réussi à la maintenir en vie toutes ses années. Et puis, Lupida était morte. Cette simple pensée parvenait à l’émouvoir aux larmes, et ce fut presque en courant qu’elle fuit vers le péristyle.  

Quelle chose stupide, le mariage.
Cinq ans. Elle était devenue nubile au moment où sa mère était tombée malade. Pendant cinq ans elle avait supplié son père de ne pas la marier, de la laisser veiller à Rome, de lui permettre de rester auprès de celle qui l’avait mise au monde. Combien de fois Lupida avait-elle veillé, les soirs où elle-même était malade ? Combien de nuits avait-elle sacrifié à son unique enfant pour chasser la terreur et le mal de ses yeux opalins ? Oh, ça n’avait certes pas empêché Flavius de revenir une ou deux fois à la charge. Il faut te marier Ovidia. Il faut te marier Ovidia. Quelle terreur à ces mots était née en elle ! Elle ne voulait pas, elle avait. La peur était passée. La tendresse commençait elle aussi à se délaver, confrontée à désillusion. Une colère sourde montait en elle. Elle avait attendu, pendant plusieurs mois, un regard. Rien. Parfois dans sa folie fiévreuse, elle se disait que le mariage ne signifiait finalement rien. Que c’était idiot. Qu’aucun lien tressé par quelques mots, une dot et le sang d’un hymen déchiré n’avait aucune valeur. Dans ces moments, la rage lui donnait envie d’haïr ; et si cette haine ne touchait pas encore Tacitus, sa sœur et son père eux avaient d’ors et déjà perdu tout ce que le cœur de la jeune Ovidia aurait pu leur offrir. L’agneau innocent devenait loup aux crocs tranchants. Et aucun mariage n’avait le pouvoir de changer cela.

« Ovidia… »

Depuis quand était-elle assise ? L’odeur de la mort l’abandonnait, remplacé par les embruns et les odeurs de fleurs. Elle était mieux, elle était calme. Et elle avait presque sursauté en entendant sa voix. Elle avait ses grands yeux pour se confronter au regard bleu sombre du mutique. Un mot. Un simple mot, prononcé par une voix presque inconnue. Toute haine semblait s’évanouir, toute rage, toute colère. Revenait cet amour inconditionnel, cet amour idiot et stupide imposé par un nom. L’aurait-elle aimé, s’il avait été l’époux d’une autre, comme elle l’aimait à présent ? Impossible de le savoir. Sans doute non. Sans doute n’aurait-elle vu que le Tacitus, sans doute serait-elle resté aveugle…

« Ovidia… Les patriciennes dorment à cette heure-là… »

Un sourire étira ses lèvres. Elle une impression étrange, que quelque chose de nouveau allait pouvoir commencer. Sans doute était-ce encore la fièvre qui la faisait délirer. « Oui Tacitus, et les patriciens veillent leurs pères malades. » Sa voix trahissait une douce forme de ressentiment, à peine dissimulée sous la douceur. C’était la première fois qu’elle se le permettait. La fièvre peut-être, à nouveau ? Elle sentait des gouttes de sueur perlaient sur son front, mais elle n’osait rien dire. « Comment va-t’il ? » Peut-être était-elle injuste finalement. Elle s’était elle aussi coupée pour sa mère… La même culpabilité la dévorait que quand elle avait pris ce poison. Elle sentait le besoin de lui dire, de lui parler, mais une angoisse l’étouffait sournoisement. « Tacitus, je… »

Tecta Intestabili, menteurs sournois. Voilà les graffitis qui avaient recouvert leur villa, et que son époux avait fait embellir dans ce qu’elle avait vu comme de l’inconscience et du génie mêlé. Voilà ce qu’ils étaient. Et elle l’était aussi. Comme s’il n’avait pas fait que lui donner son nom.

Mais à lui, elle ne voulait pas mentir.

« Je suis allée au quartier de l'Abondance. Je... »

Quelle curiosité terrible, le mariage.

V. « Chacun de nous porte en lui le ciel et l'enfer. »

Nous avions promis de revenir sur le caractère d’Ovidia, voici l’heure où nous faisons tomber le masque. Que ne peut-on la trouver attachante cette fillette dévouée et tendre, cette enfant blessée dans son orgueil. A défaut de devenir gladiatrice, la jeune femme était devenue une guerrière. E elle avait cessé de s’effrayer de la mort et de la maladie, voyant que ces dernières emportaient sa mère, et n’en ayant plus peur s’était armée pour tuer. Si elle n’avait pas un glaive, elle possédait un esprit affuté ; si elle n’avait pas de bouclier, elle avait une force de caractère et une détermination devant l’obstacle qu’il faut franchir impressionnantes. Elle avait le talent de la dissimulation comme une tradition, et tout comme la placidité mutique de ce dernier l’avait fait désespérer à tort pendant des mois, il n’avait su lire en elle. Mais à présent, s’il continuait de s’attendrir devant l’agneau blanc et fragile qu’elle semblait être (et qu’elle était encore un peu), il savait. Et il parla lui aussi. Comme elle avait parlé de sa liaison coupable et du poison, comme elle avait déclaré son amour et sa loyauté, il parla du pater violent et méprisable, de sa sœur qui ne l’était pas vraiment puisque son père était un autre, de la colère de Blaesus contre elle et son acharnement, jusqu’à la vengeance, un poison qu’il avait vu lui-même Minor versé dans le verre de l’aîné. Il parla comme il parlait enfin à son père, sauf que s’il torturait le vieillard de ses reproches et de ses insultes, il ne fut que tendresse et patience pour son épouse, l’excusant presque totalement en se culpabilisant de n’avoir su la protéger des serpents. S’il prenait conscience du machiavélisme d’Ovidia, il voyait aussi sa fragilité. En effet, bien que nous ayons présenté notre agneau comme une guerrière, il nous faudra nuancer nos propos. Certes, elle en avait le caractère, et était loin d’être inoffensive, mais elle restait rongée par une mélancolie qui faisait d’elle une rêveuse à la sensibilité exacerbée. Elle était sans cesse au bord du fil, et il fallait que quelqu’un la retienne de tomber. Entourée de ses et pour les siens, elle était certes capable d’être terrible, mais seule face à l’adversité elle pouvait se briser en peu de temps. Et surtout, elle sous-estimait elle-même cette faille dans l’innocence de l’enfant qui n’a encore gagné que des batailles imaginaires, et elle agissait encore trop sous le coup de l’impulsion imprévisible.

*
**
*

La Mort. Définitive et terrible. Une fin qui marque un nouveau temps aux enfers. Une étape de la vie que beaucoup voudraient éviter, et qui pourtant n’épargne personne. Elle ne la craignait pas.

Quand on n’a pas vingt ans, on n’a pas peur de mourir, et pour Nemetoria Loreia Ovidia sa mort semblait trop lointaine pour qu’elle s’en inquiète. Ce qui l’inquiétait, c’était la mort des autres. Son père, son mari ; autrefois sa mère. Et la vie des autres. Cette vie que les Parques continuait de filer et laquelle il était tant de trancher. Cette vie dont la lente agonie de finissait pas. Celle de Blaesus. La colère et la haine que lui vouait Tacitus avait touché son cœur qui s’était à jamais fermé à cette charogne ambulante. Tout comme son époux, elle ne souhaitait plus que sa mort. Mais contrairement à lui, elle n’avait aucun lien avec le militaire qui empêchait sa conscience de forcer les ciseaux de Morta à rompre ce fil.

Son époux dormait, paisible. Elle eut aimé un moment rester contre lui, et apprécier la chaleur de sa peau nue contre la sienne, humer son odeur, rêver au bonheur qui était enfin sien. Mais l’honneur d’être heureuse ne lui revenait pas encore, il planait encore au dessus d’eux une ombre noire. Elle sortit en silence, et frissonna dehors du froid de la nuit noire qui mordait sa peau trop peu couverte. Lentement, elle glissa jusqu’à cette couche maudite, et trouva Blaesus seul, conscient, allongé dans sa propre fange, comme enfermé par ce corps qui n’était déjà plus qu’un cadavre.

La Mort a une odeur. On la sent près des mourants dans leur dernière minute. C’est pestilentiel, plus encore que la puanteur de la maladie et de la merde. C’est une odeur de crainte lâche, du dernier instant où l’on espère vaincre et où l’on sent que l’on est vaincu malgré cette rage, d’une peur enfantine et méprisable sur le visage d’un homme. Blaesus détaillait sa belle fille avec tous ces sentiments mêlés, et sans même prêter attention à son visage elle sentait les relents morbides effleurer ses narines délicates. Ovidia eut un sourire, et comme un geste doux pour remettre les coussins du mourant en place. Un instant il y crut et se pensa sauvé, dernière de ses folies. Car celui qui suivit, il étouffait sous le velours qui avait supporté sa tête malade pendant ses dernières heures.

Ovidia souriait tristement.
Dans son ombre se tenait Tacitus.

« If you think this has a happy ending, you haven’t been paying attention… »
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Patricien
Dim 29 Mar - 19:30
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Claudia Cassia
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Oooooh Nolwen c'était sublime ! Please Pleure Please

Magnifique refonte! Calinchou Alors ..... c'est officiel ... rebienvenue parmi nous ? Stp Content
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